Une Education catholique
Marie a reçu Une Education catholique. A lire le récit qu’elle en donne, on ne peut s’empêcher d’en douter. Non pas pour des raisons fondées sur ses erreurs et ses fautes : qui, parmi nous, lui lancera la première pierre ? D’ailleurs, avec la confession, n’en est-elle pas absoute ? Mais il semble que manque à son éducation, l’originalité même du catholicisme : l’incarnation.
Dieu. Dieu. Dieu. C’est ainsi que se déploie la Trinité de Marie dans un triptyque qui ne manque pas d’esprit, mais de Christ. Ainsi ne se souvient-elle pas des personnes qui lui enseignèrent le catéchisme, et lorsqu’elle communie, pour elle l’hostie est « le corps de Dieu ». Non, Marie, c’est faux. Pourtant, avec une de ses petites amies, ne lit-elle pas L’Annonce faite à Marie ? Ne comprend-elle pas le message que Gabriel vient porter ? A moins qu’il ne s’agisse d’une omission originelle ?
Oui, à peine Marie a-t-elle le temps de contempler l’incarnation avec la naissance de son neveu, qu’il meurt. C’est sa rencontre avec le Réel. Alors se déclenche en elle l’irrépressible besoin de rencontrer Dieu à nouveau : « Je n’ai pas su comprendre que je l’aimais, parce que j’avais trop besoin du verbe, et que le verbe c’était Samuel. Trop besoin de la croix, et que la croix c’était Samuel. »
Elle devient une jouisseuse de la croix, à chaque fois qu’elle rencontre Samuel, comme un clou planté dans sa chair, comme une incarnation enfin réalisée : « Qu’il comble mon trou. Qu’il me remplisse à jamais, sans jouir, sans finir. » Si elle n’a plus peur alors, si elle ne pense plus « qu’on est toujours puni », ce que l’on enseigne dans toute éducation catholique, c’est qu’un jour elle a entendu ce message : « Ne te laisse pas faire. ». Et pourtant, Une Education catholique, de Catherine Cusset, se paiera forcément un jour.
Catherine Cusset
Gallimard 15,90€