#MeToo Tu étais petite fille, tu courais partout, les adultes te regardaient avec tendresse et bienveillance. A la plage tu ne portais qu'un bas. C'était bien. À tes yeux, t'étais comme tes copains. Tu comprenais juste qu'en bas, c'était pas vraiment pareil. Et puis t'as grandi. Et puis les regards ont commencé à changer. Des regards qui te font te sentir mal. Des regards qui te font culpabiliser d'avoir ces seins qui poussent, ces hanches qui se développent. Ces regards qui te font remonter ton haut jusqu'au cou parce que ce qu'il y a là, ça ne les regarde pas. C'est à toi. Tu ne comprends pas sur le coup, pourquoi ces hommes laissent trainer leur regard sur ton corps ? Ils ne regardaient pas autant avant, si ? Il a le même âge que ton père pourtant, qu'est ce qu'il se passe ?! Et puis tu découvres que tu deviens désirable. Et puis tu commences à lancer des regards noirs quand ça te mets mal à l'aise. Tu ne peux faire que ça, même les pulls et les jeans larges ne suffisent pas à chasser ces regards qui te déshabillent sans ton consentement. Et tu continues de grandir, tu deviens une jeune femme. Et les garçons t'abordent. "Hey t'es magnifique (...) Hey tu peux répondre quand je te parle ! Salope !" "Je peux marcher avec toi un peu ? Jusqu'à chez toi ? Et tu me fais monter ?" "Elle est sympa ta queue de cheval. C'est mieux pour la levrette." Et encore d'autres choses que tu ne dis pas, parce que c'est toi qui a honte. Et on se demande pourquoi tu deviens agressive. Tu deviens agressive parce que c'est comme ça que tu sens que tu peux fuir. Tu réponds mal, tu montres les crocs. Toi qui était déjà garçon manqué, tu espères que ça fera de toi quelqu'un d'encore moins désirable. Et puis un jour, un garçon t'aborde gentiment, mais toi t'es toujours sur la défensive. "Putain, mais qu'est ce qu'il me veut encore ?" "Mademoiselle, vous êtes rayonnante ! Il fallait que je vous le dise ! Bonne journée !"Et toi tu restes plantée comme un pilonne. T'étais prête à lui sauter à la gorge. Il était juste gentil. Sans rien attendre en retour. Putain c'est quoi ce délire ? Tu rougis. Tu flotterais presque. Il est parti. C'était tout. Gratuit, sans rien attendre, sans allusion, juste un compliment. Mais d'où ça sort ? Peut être que c'est possible alors ? Non ? Et le lendemain, tu re-sens sur ton corps ces regards sales, ces regards qui te donnent envie de vomir. Ces regards qui te font regretter d'avoir oser porter cette jupe aujourd'hui. "Mais que t'es conne". Et tu gardes dans un coin de ta tête les rares compliments sincères que tu as pu avoir. Les compliments gratuits, les sourires timides, les dragueurs gentils qui sont repartis déçus mais compréhensifs. Le regard doux de celui qui te regarde vraiment. Tu gardes ça dans ta tête pour les fois où tu rentres seule le soir et que tu dois passer par une gare. Que tu passes devant un groupe de garçons qui te siffle. Que t'as eu le malheur de mettre une robe et que tu rentres plus tard que prévu. Et même en y repensant, en gardant ça précieusement dans un coin de ta tête, tu te rends compte, en analysant ton petit bout de vie;que tu as été plus de fois honteuse d'être une femme à cause de ces yeux vicieux que fière d'en être une. Et cela doit changer. Vraiment. La honte n'est PAS ressentie par les bonnes personnes. On va se dire, les filles, que nos corps ne leur appartiennent pas. Ce sont les nôtres, c'est à eux de contrôler leurs putains de queues. De contrôler leurs putains de sourires. Si je ne souris pas, n'insiste pas. Fous moi la paix. Non c'est non. Et ma robe si je la porte c'est pas pour toi, c'est pour moi. Merci aux garçons respectueux. Vous êtes des perles. Eduquez vos fils. Bordel.